Arthur et Compagnie (Chapitre 7)

ARTHUR & COMPAGNIE

Une histoire épique de chevaliers, de dragons, de magie et de hobbits*

* Merci de ne pas jeter vos hobbits usagés sur la voix publique.

CHAPITRE VII

Le matin se levait sur Poutrenbois. Le coq hurlait à pleins poumons, avant de se faire trancher la gorge par le fermier dont la femme le cuisinerait à la sauce au vin pour le repas de midi. Le ciel était bleu, le soleil brillait et l'odeur de ragout de coq remplissait déjà les chaumières. Un éclat de ce fameux soleil traversa, comme par hasard, la petite lucarne d'une écurie attenante au Goret Foireux, où, bien évidemment, nos valeureux guerriers, rescapés de la vie nocturne locale, avaient trouvé refuge pour la nuit. Et ce fut Arthur qui se prit le premier rayon en pleine poire...

"Hmmmm... pas dans les yeux... raaaaah..."

Il se détourna du rayon aveuglant, et murmura tendrement, mais de sa voix la plus virile...

"Hin hin hin! Alors, ma p'tite coquine des bois? C'était aussi bon pour toi que pour m... hm?"

Mais quelque chose n'allait pas... Quelque chose manquait...

"Vahla?!"

Il se dressa, comme piqué par une mouche tsétsé, et regarda frénétiquement autour de lui...

"OH MY GOD!!! VAHLA? VAHLA!!!"

Puis il se jeta hors du foin et couru afin d'alarmer son équipe de choc, qui dormait encore profondément à l'étage inférieur de l'écurie:

"MERLANISHER! PAYRDEBAWLZ! C'EST UNE CATA!!!"

Ces deux derniers eurent beaucoup de mal à sortir de leur sommeil.

"DEBOUT!!! Y'A URGENCE!!! VIIIIIIIITE!!!"

Le magicien fixa son hiboux avec précaution et tendresse sur son épaule et questionna le roi en panique:

"Sire? Mais qu'est-ce qui..."

"C'EST HORRIBLE!!! C'EST VAHLA!!! ELLE A DISPARU!!!"

"Mais s..."

Arthur jeta un vif coup d'oeil par la porte...

"QUELQU'UN L'A CERTAINEMENT ENLEVE!!! SUREMENT UN GROUPE D'OGRES OBSEDES DU CUL QUI VEULENT LUI FAIRE DES CHOSES AVANT DE LA BOUFFER EN COMMENCANT PAR SES RAVISSANTS NICH..."

"SIRE! Je..."

"VOUS AVEZ RAISON, MERLANISHER!!! C'EST IMPOSSIBLE!!! POUR LA PRENDRE, ILS AURAIENT ETE FORCES DE NOUS EGORGER PENDANT NOTRE SOMMEIL... MAIS... mais... OH MY GOD!!! ELLE M'A LAISSE EN PLAN!!! C'EST ENCORE PIRE!!!"

"Sire, vous dev..."

"MAIS POURQUOI?! P O U R Q U O I ?! J'AI ASSURE COMME UN JEUNE TAUREAU REPRODUCTEUR TOUTE LA NUIT!!! J'AI MÊME DIS SON PRENOM ET PAS CELUI D'UNE AUTRE POUR UNE FOIS!!! JE ME SENS... VIOLE... ABUSE... JE ME SENS SALE... SI SALE... OH MY GOD!!!"

Et il s'éffondra à terre, se mis en position foetale et se masqua le visage en sanglotant. Ce qui réveilla enfin Sire Payrdebawlz.

"Vindieu! Mais c'est quoi ces gloussements? J'croyais qu'on avait pris une suite dans une écurie, pas dans un maudit poulailler! Et pourquoi sa royauseté s'roule par terre et pourquoi qu'il est tout à poil?!"

Mais Merlanisher lui fit signe de se taire...

"Sire, je tente depuis le début de votre crise de panique de vous expliquez que..."

"ME DIRE QUOI?! QUE MA VIE EST FOUTUE?! QUE JE ME SUIS FAIT BAISER PAR UNE ELFE NYMPHOMANE?! VOUS VOUS RENDEZ COMPTE?! MON IMAGE DE MARQUE! MA REPUTATION! FOUTUES!!!"

"Sire, calmez-vous, enfin! Laissez-moi vous expliquer! Hier soir, après la 35ème bière, vous aviez un peu de mal à vous tenir debout, et vous avez perdu connaissance en sortant de la taverne. Gonzo, le videur, nous a aidé à vous transportez ici et Vahla m'a dit de vous dire que c'était partie remise en ce qui concernait vos... euh... affaires privées et qu'elle nous rejoindrait vers midi au nord des douves de Triquenlair pour nous guider à l'intérieur du donjon!"

Arthur se remit debout...

"Ouais... hum... je le savais bien sûr... je voulais juste voir si vous euh... vous étiez prêt dès que je lançait une alerte rouge par surprise. Bien, bien... je suis fier de vous... bon boulot, continuez comme... euh..."

Les éléments du récit de Merlanisher venaient soudain de s'assembler un peu plus clairement dans son esprit et l'image ne lui plaisait guère...

"Merlanisher? Si je n'ai pas... enfin... vous savez... bing-bing-tagada avec Vahla... comment je me suis retrouvé... comme ça... à poil?"

Il fixa tout d'abord Payrdebawlz d'un regard foudroyant...

"Ah bah j'peux déjà vous garantir que c'tait pas moi, vot' royauseté! D'une, j'étais tellement r'fait comme un gnome, qu'il m'a fallu ramper à l'aveuglinette jusqu'ici, et de deux, j'toucherais JAMAIS un homme, non m'sieur, plutôt m'faire hobbit!"

Puis il riva son regard meurtrier sur Merlanisher...

"Euh... eh bien... erm... Gonzo pensait que vous seriez plus à l'aise pour dormir sans vos vêtem..."

"ATTENDEZ! QU... QUI?!"

"Gonzo, sire, le troll, le videur du Goret Foireux..."

Après un silence pesant de quelques secondes, au cours desquelles notre roi bien aimé s'imagina d'horribles scènes portant atteinte à sa masculinité, il murmura sur un ton totalement neutre:

"Cette... histoire... n'a jamais eu lieu... et si l'un de vous venait malgré tout à l'évoquer ou même ne serait-ce qu'à y penser, je lui réserverais la mort la plus atroce qu'une créature puisse subir sur cette terre... maintenant, vous m'excuserez... mais je dois... prendre... un bain... d'urgence..."

"Bien compris, sire... motus et bouche cousue..."

"Moi j'sais même plus d'quoi on parlait de toute manière, vot' royauseté!"

"Silence! Je... je veux juste... être... seul..."

Et Arthur s'éclipsa sans dire un mot de plus par la porte de derrière.

"Il avait pas l'air dans son assiette, m'dame Merlanisher, il était blanc comme d'la craie! P'tet qu'on devrait lui apporter un p'tit que'que chose pour le déjeuner?"

Après qu'Arthur se soit offert deux bonnes heures de lavage intensif à la brosse de poils de hérisson, nos amis prirent enfin la route afin de rejoindre Vahla au point de rendez-vous. Ils chevauchèrent tout d'abord vers l'est, puis au nord, à travers une rivière parce qu'ils n'avaient pas vu le pont un peu plus loin, puis vers l'ouest afin de corriger leur trajectoire érronée par le courant de la rivière, pour finalement reprendre vers le sud et enfin arriver à leur destination, avec une heure de retard.

"Ah! Enfin! On est arrivé... et ce n'est franchement pas grace à vous, Payrdebawlz!"

Tout en descendant de son poney, le nain grogna en retour:

"J'vous avais ben dit qu'j'avais un sens d'l'orientationnement qui marchait mieux sous terre! On s'rait passer par des tunnels, ça f'rait d'belles lurrettes qu'on s'rait arrivé!"

"Et ça aurait pris combien de temps pour les creuser vos tunnels? Hein?"

"Eho! J'peux pas penser à tout non plus, hein! Pour les problèmes de logistication, faut vous adresser à not' grosse tête de m'dame Merlanisher! Moi, j'suis là que pour fout' des raclées et casser des trucs!"

Arthur scruta les environs, tout semblait calme au bord des douves. Notre commando médiéval était bien à l'abri, sous quelques arbres denses qui jonchaient les rebords de l'eau. En revanche, aucun signe de la viol... voleuse.

"J'espère que ce n'est pas le genre de nana qui est trop à cheval sur la ponctuali..."

Mais une main que notre héros connaissait fort bien vint soudain lui pincer son arrière-train royal:

"AH!"

"Bonjour, majestounet! Hi hi!"

"Oh! Bonjour demoiselle Vahla, vous êtes bandan... euh... resplendissante, comme toujours... désolé pour le léger retard et ... euh... pour hier soir..."

"Ce n'est rien que nous ne pourrions rattraper de manière *beaucoup* plus intense ultérieurement, majestounet! Hi hi hi!"

"Ce sera avec un *énorme* plaisir... Oui, erm... mais tout d'abord, il nous faut absolument délivrer mon deuxième chevalier, sinon Merlanisher va finir par nous faire un caca nerveux. Il n'a pas arrêté de nous emmerder tout le long du chemin comme quoi, si on arrivait en retard, que sire machintruc allait être pendu, que mon destin serait ainsi compromis, que sa robe lui rentrait dans la raie du cul et que ça lui pinçait horriblement les poils, qu'il était malade sur les chevaux parce que ça tanguait, qu'il avait probablement manger quelque chose à la taverne qui était mal passé et que c'était pour ça qu'il fallait qu'on s'arrête toutes les dix minutes pour qu'il puisse disparaitre dans les buissons en courant... je ne vous raconte pas la galère!"

"Je suis pratiquement certain que c'était le ragout de coq, sire... rien qu'à y penser... ooooh!"

"J'ai vu des buissons un peu plus loin, Merlanisher..."

"Je... euh... reviens tout suite... veuillez m'excuser..."

Une bonne demie-heure plus tard, le petit groupe s'était réuni autour d'une souche d'arbre et établissait le plan d'assaut de la forteresse de Triquenlair:

"Bien, voici un schéma du château..."

"On dirait plutôt tout un tas de ch'tits cailloux et d'brindilles, vot' royauseté!"

"Ces cailloux sont ordonnés afin de reproduire un modèle réduit aussi fidèle que possible du château, sire Payrdebawlz! Ils représentent les tours défensives, le donjon, les murs..."

"Et les ch'tites branches, là?"

"C'est nous..."

"Pourquoi qu'y'a donc une branche avec un escargot d'ssus?"

"Merlanisher a insisté pour que... Boubou soit également schématisé sur son personnage..."

Le magicien ajouta sur un ton ferme et en levant un doigt:

"Il faut que ce soit réaliste au possible, afin de garantir notre succès!"

"Bon! Passons donc au..."

"Et pourquoi y'a une branche pleine de mousse qu'est plus ch'tite que les aut'es et qui..."

"C'EST VOUS, PAYRDEBAWLZ! OK?"

"Vindieu! D'accord! Je f'sais juste que de d'mander! Pas besoin d'piquer une colère, vot' royauseté!"

"Alors! Selon les informations que nous a fourni notre charmante nouvelle compagne Vahla, le seul moyen d'entrer dans le château se trouve être une bouche d'évacuation qui se déverse dans les douves, juste en face de notre position actuelle. Elle se trouve sous le niveau d'eau, il nous faudra donc plonger quelques mètres afin de..."

*tousse!*

"... je disais donc, qu'il nous faudrait plon..."

*TOUSSE!*

"Sire Payrdebawlz? Vous avez quelque chose à nous communiquer ou vous avez une souris morte dans la gorge?"

Le nain baissa ses petits yeux noirs tout en se frottant son épaisse barbe rousse de honte:

"Eh ben... c'est que... j'sais pas nager... vous voyez, les nains, ils coulent comme des pierres dans l'eau... Quand on veut traverser une rivière, on attend généralement qu'un clampin passe, on l'assomme et on s'en sert comme d'un rat d'eau, vous savez..."

"Je vois... euh... ça risque effectivement de poser problème... quelqu'un aurait une idée brillante?"

Après quelques secondes de silence, Merlanisher se manifesta, un sourire triomphant aux lèvres:

"J'aurais peut-être une solution, sire! J'ai quelques herbes magiques avec moi ainsi que du foie de canard de barbarie, je pourrais user de mes dons d'alchimiste afin de faire un breuvage capable de transformer sire Payrdebawlz en une grenouille, ce qui lui permettrais de traverser sans soucis les douves, puis ensuite je lui concocterais un remède qui lui redonnerais sa forme d'origine... enfin... en théorie..."

Quelques autres brèves secondes de silence suivirent la proposition de Merlanisher, qui furent cette fois interrompues par Payrdebawlz:

"J'pense que j'préfère me j'ter à l'eau et crever sans souffrances... euh... j'veux dire, tenter ma chance... la noyade m'semble êt'e tout d'même moins dangereuse... sauf vot' respect m'dame Merlanisher..."

L'elfe ajouta immédiatement:

"Vous pourriez l'attacher comme un sac à votre dos le temps de traverser les douves, majestounet, avec tous vos muscles, si forts, si durs, si..."

"Oui, euh... erm... je pense que ça serait faisable!"

"Mais!? Sire!"

"Merci pour votre contribution, maitre Merlanisher, mais nous allons opter pour le coup du nain attaché dans mon dos, même si l'idée d'avoir Payrdebawlz collé contre mes fesses ne me plait guère. Ensuite, ce sera à Vahla de nous guider à travers le cloaque infesté de monstres hideux. Arriver au donjon, on défonce tout ce qui bouge, on prend le chevalier et on se taille par le même chemin."

"Moi, j'aime b'en c'plan... surtout la partie où on déglingue tout l'monde qui bouge, ça, j'approuve!"

"Bien, dans ce cas, préparez-vous tous! L'opération, nom de code 'infiltration rectale' débutera dès la nuit tombante!"

La suite de cette mission impossible dans le prochain chapitre!