Arthur et Compagnie (Chapitre 5)

ARTHUR & COMPAGNIE

Une histoire épique de chevaliers, de dragons, de magie et de hobbits*

* La consommation d'alcool doit se faire avec modération et sans hobbits.

CHAPITRE V

Après leurs aventures éprouvantes dans les marais, nos trois héros avaient grand besoin de repos, d'un bon repas, d'un bain chaud, de quelques litres de bonne bière et de compagnie féminine. Ils décidèrent donc de se rendre à Poutrenbois, un petit village à quelques lieux de leur position actuelle.

Ils y trouvèrent une taverne de renommée, le Goret Foireux, où ils espéraient avoir accès aux commodités et services qu'ils désiraient tant. L'ambiance était bonne pour un jeudi soir et le local regorgeait de beau monde, venu de tous les coins d'Angle de Terre. Il leur fut assez difficile de trouver une table, et ce ne fut qu'après une petite crise de colère de Payrdebawlz, qui jeta de ses propres petites mains boudinées toute une compagnie de hobbits dehors juste après leur avoir brisé les mâchoires avec leur choppes de bière sans alcool, qu'ils eurent enfin droit se s'assoir et se détendre au gré des mélodies des bardes qui jouaient et chantaient joyeusement près de la cheminée.

L'établissement était tenu par un certain Fred Pichet, que l'on surnommait aussi Fred "le boiteux", ou Fred "à trois jambes", ou encore Fred "sale radin, passes-moi donc une autre choppe de ta pisse de mulet". C'était un personnage connu de tous, un ancien vétéran de la grande invasion de goblins jaunes des Montagnes de Drouïe. Un homme d'une stature imposante et au rire tout aussi imposant, qui avait été blessé à la jambe droite au cour de l'assaut de la forteresse de Sha Lamar. Mais oublions ce personnage, certes fort sympathique, mais qui n'a finalement aucun rôle important dans l'histoire, ce petit paragraphe ne servant qu'à étoffer le tout de quelques détails inutiles comme dans tout bon récit médiéval-fantastique.

Nos trois amis en étaient à leur neuvième choppe de bière, et l'on sentait déjà que leur moral était très nettement en hausse. Arthur ne cessait de toucher les fesses de toutes les serveuses qui passaient à porter de bras de la table et Payrdebawlz planifiait déjà la prochaine baston générale qu'il allait déclencher. Seul Merlanisher semblait perdu dans ses pensés, au-dessus de sa limonade au sirop de myrtilles. Ce qui éveilla la curiosité d'Arthur:

"Quelque chose vous tracasse, Maitre Merlanisher?"

"Je n'arrive toujours pas à comprendre comment vous avez découvert le point faible de cette gargouille, sire. Je veux dire, ce n'est pas comme si elle avait porté une tunique avec un slogan brodé dessus, du genre: Plante ta lame dans ma gueule pour me tuer!"

"Eh bien, je dirais que c'était un coup de bol... au départ, j'avais envisagé de lui planter Excaliburne dans les yeux, mais ça me semblait un peu dégueulasse et puis je n'avais qu'une épée, et une gargouille borgne, ça reste tout de même relativement dangereux, et je n'allais pas mettre en jeu mon cul royal pour si peu. Mais pour être totalement honnête avec vous, ce qui m'énervait le plus, c'était surtout sa voix immonde et grinçante. Alors je me suis dis que si je la faisais taire, ça serait déjà ça de gagner, mais je ne me doutais pas que ça allait la bousiller. Comme quoi, j'ai eu la bonne idée au final, hein? HA HA HA!"

"On peut dire ça, oui, sire... ha ha... erm... une coïncidence fortuite...", il se tourna discrètement vers son hiboux,"On est pas dans la merde, Boubou..."

"Vous dites, Merlanisher?"

"Non, euh, rien, sire... je me disais simplement que nous, euh, ferions bien de reprendre de la bière et de manger un bout..."

"Une fort bonne idée! Sire Payrdebawlz! la même chose pour vous...?!"

Mais le chevalier-nain, qui véhiculait désormais plus d'alcool que de sang dans ses veines, était déjà en route... mais pas pour le bar. Il avait repéré un troll immense, qui l'avait observé depuis une bonne heure, et notre petite barrique de bière ambulante avait décidé de lui demandé poliment la raison de cette intense observation... avec ses poings.

"Je pense que je vais devoir une fois de plus prendre les choses en mains... Rajoutez sur la liste qu'il nous faut me trouver un esclave ou un truc dans le genre, Merlanisher, je commence à en avoir raz-le-bol de devoir tout faire moi-même, je suis roi mine de rien, ce n'est tout de même pas normal que je sois encore obligé de faire toute la basse besogne... c'est vraiment pas possible ça..."

Et sur ces mots, Arthur se dressa, perdu l'équilibre quelques secondes, s'appuya sur la tête d'un gnome qui passait par là...

"EHO!"

"Désolé, je vous ai pris pour un tabouret..."

... et s'engagea à travers la foule en direction du bar, afin de réquisitionner quelques choppes du breuvage fort en houblon.

Mais alors qu'il s'approchait, en zig-zag, afin d'éviter de piétiner des gnomes, hobbits et autres petites créatures ridicules, il vit une somptueuse...

"PUTAIN! LE CANON!"

... oui, ce fut en quelque sorte ce que j'allais dire. De manière certainement plus lyrique, mais cette exclamation résumait plutôt bien l'aspect étourdissant de cette beauté fatale qui, accoudée au bar, dégustait un baccardi-cervoise à la cerise.

Arthur, qui était soudain comme hypnotisé par les charmes de cette déesse aux longs cheveux noirs, se dirigea sans autre détour involontaire en direction de cette dernière. Faisant mine de ne pas la voir, il commanda bruyamment une tournée pour sa table en secouant virilement sa bourse... euh... d'argent, d'or et de joyaux.

"ALORS! ELLES ARRIVENT MES BIERES OU IL FAUT ENCORE QUE TU LA DISTILLE LA PIQUETTE? ON A PAS TOUTE LA NUIT POUR SE BOURRER LA GUEULE!"

Puis, il se tourna vers la magnifique créature et s'adressa à elle:

"Oh! Pardonne-moi, ma belle! Je ne t'avais pas vu, sinon je n'aurais pas hurlé comme ça..."

Et d'un ton particulièrement doux, mais avec une petite note de dédain, celle-ci lui retourna:

"Ne vous inquiétez pas, j'ai l'habitude des ploucs et de leur manières dignes de celles d'orques décérébrés, et faites, par pitié, comme si je n'étais pas là." *soupir!*

"Faire comme si tu n'étais pas là? Tu veux rire, poupée? Tu es comme un rayon de soleil dans une grotte infestée d'araignées géantes mangeuses-d'hommes, comme une brise de printemps dans une porcherie après l'hiver, comme une... EH! EHO! MAIS NE T'EN VAS PAS! J'AVAIS PAS FINI!!! TU ES COMME... comme..."

Alors qu'Arthur retournait son esprit d'éternel romantique à la recherche d'une autre analogie poétique, une autre voix se fit entendre, tout près de son oreille:

"Certaines femmes telles que celle-ci, ne savent pas apprécier des hommes tels que vous à leur juste valeur, noble sire."

Tout en croisant les doigts pour qu'il ne s'agisse pas d'un gros et vilain boudin, et préparant au cas où une rétorque adaptée, Arthur se retourna afin de faire face à...

"OH... MY... GOD!?!"

... en fait, non, pas à un dieu, mais à une elfe. Une elfe absolument et incroyablement belle. Certes, de petite taille, mais toutes les autres proportions étaient telles qu'elles devaient l'être chez une femme. Et un peu plus à certains endroits, comme il était possible de le voir en observant le décolleté plongeant de la tunique moulante de ce fantasme devenu réalité. Ses cheveux brillaient comme de l'or tissé et ses yeux était d'un vert émeraude profond, ce qui faisait de chacun de ses regards une caresse. Ses lèvres étaient pulpeuses et sensuelles, et sa peau pâle avait une apparence douce et satinée.

"Je... euh... moi... sire... content... vous... tu... bois un verre?"

"Je vous perturbe, noble sire? Ce n'était pas mon intention... hi hi hi!"

Se ressaisissant aussi bien que mal du choc, notre roi en herbe lui retourna, coolement:

"Erm... nan! Nan, nan! Pourquoi devrais-je être perturbé? Alors... erm... vous... euh... vous viendez souvent ici?"

Et elle répondit, sur un ton tellement chaud qu'il aurait pu déclencher la fonte de tous les glaciers des environs:

"Non, c'est la première fois que je viens dans cet établissement, noble sire."

Fred, qui est le tavernier pour ceux qui n'auraient pas lu le petit paragraphe inutile plus haut, arriva avec la commande d'Arthur en ce même instant:

"Voilà pour vous, la grande gueule, et dites à votre nain d'arrêter de chercher des noises à mon videur, sinon il risque de finir en puzzle... Ah! Tiens! Salut Vahla, ça va se soir? Je te sers la même chose que d'habitude?"

La mine de l'elfe devint soudain sombre...

"C'est ta nouvelle proie, ce type?"

Très sombre... obscure même...

"J'ai compris... je dégage... désolé..."

Sur ce, Fred, qui ne réapparaitra plus dans l'histoire, dégagea le plancher. Et comme une girouette bien graissée en pleine tornade, l'elfe devint à nouveau souriante et repris son air de dévoreuse d'hommes:

"Veuillez excuser ce malpropre, noble sire, je ne sais vraiment pas de quoi il parlait... d'ailleurs, parlons plutôt de vous! Vous me semblez être un fort bel exemplaire du mâle humain! Hi hi hi!"

"Ha ha ha! Eh bien! Oui, je ne le cache pas! Ha ha! Je suis plutôt en forme! J'ai d'ailleurs refait le portrait à une gargouille pas plus tard qu'hier!"

"Une gargouille? Comme c'est horrible! Hi hi! Et courageux de votre part! Hi hi hi!"

"Orf! On fait se qu'on peut, hein? Ha ha ha! Enfin, ce n'était pas siiiiiii épuisant que ça, hein? Je lui ai enfoncé mon glaive au fond de la gorge et paf! Elle était morte! Le pire était en fait de nettoyer toute la bave blanche que ça a laissé dessus..."

"..."

"Sur mon épée! Tenez, regardez!"

Et Arthur posa Excaliburne sur le bar. Les yeux de l'elfe se rivèrent sur l'objet long, brillant mais néanmoins tranchant:

"Elle doit avoir beaucoup de valeur, noble sire..."

"Ah ça! Oui! Il s'agit là d'Excaliburne, ma belle demoiselle. Je l'ai extirpé de la roche de ferrero tout au début de nos aventures. Ce qui fait techniquement de moi le roi de tout l'Angle de Terre. D'ailleurs, veuillez excuser mes manières de rustre, je ne me suis pas présenté: Arthur Pendragoor, du clan des Pendragoors, fils unique de Rocco Siffredi Pendragoor, héritier du throne et aventurier en quête, enchanté de faire votre si ravissante connaissance!"

"Tout le plaisir est pour moi, votre majesté, je me nomme Vahla Craft de Delavair Jenflahme. Je suis une elfe des bois, je suis célibataire, capricorne. Je suis une vo... euh... une récupératrice d'objets rares."

"Enchanté, demoiselle Vahla, puis-je me permettre de vous baisez la m..."

Mais au même instant et telle une douche froide en plein hiver sibérien:

"Pardonnez-moi cette interruption, sire, mais j'ai cru entendre, par pur hasard, que cette charmante personne était une elfe des bois récupératrice d'objets rares..."

"MERLANISHER?! PUTAIN! J'ai failli faire une syncope... mais... MAIS QU'EST-CE QUE VOUS VOULEZ?! VOUS NE VOYEZ PAS QUE JE SUIS TRES, TRES, TRES, TRES, TRES, TRES, TRES OCCUPE LA?!"

"Je suis navré, sire, mais je pense que cette personne pourrait nous être fort utile pour la suite de notre épopée, et que nous ferions bien..."

"OUI! EN EFFET, MERLANISHER, IL EST CLAIR QU'ELLE ME SERAIT RUDEMENT UTILE ACTUELLEMENT, SURTOUT SI NOUS POUVIONS ETRE SEULS ET A POIL, ELLE ET MOI, DANS UNE BOTTE DE FOIN ET EN TRAIN DE... euh... je veux dire, en train de discuter de politique et de la situation économique du pays... erm..."

"Vous me voyez vraiment désolé, sire, mais je pense qu'il serait vraiment d'une extrême importance que nous discutions avec demoiselle Vahla à notre table..."

Ce qui semblait plutôt bien convenir à l'elfe:

"J'en serais ravis, Maitre Merlanisher, mais uniquement s'il en convient à sa majesté, bien entendu! Hi hi!"

Ce qui ne semblait pas réellement convenir à Arthur:

"Ouais... ouais, bien sûr, je vous en prie. J'en suis gré et tout ça..."

Et sur ces mots ils allèrent vers leur table, sous laquelle était étalé Payrdebawlz, en train de se remettre de la torgnole que venait de lui infliger le troll-videur du Goret Foireux.

La suite de ce récit haut en couleur dans le prochain chapitre!